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Zone historique de Willemstad, centre ville et port, Curaçao

Zone historique de Willemstad, centre ville et port, Curaçao

Les Hollandais ont établi en 1634 un comptoir commercial dans un beau port naturel de l’île de Curaçao, dans les Caraïbes. La ville s’est développée de façon continue durant les siècles suivants. Elle comporte plusieurs quartiers historiques distincts dont l’architecture reflète aussi bien les styles des Pays-Bas que ceux des villes coloniales espagnoles et portugaises avec lesquelles Willemstad faisait du commerce.

Valeur universelle exceptionnelle de la Zone historique de Willemstad

Brève synthèse

La Zone historique de Willemstad est un exemple d’établissement colonial doté d’un rôle commercial et administratif. Elle a été créée par les Hollandais sur l’île de Curaçao, située dans le sud des Caraïbes, à la pointe de l’Amérique du Sud. L’édification du Fort Amsterdam en 1634, sur la rive orientale de Sint Anna Bay, marque les débuts du développement de la ville qui s’est poursuivi au fil des siècles suivants.

La ville moderne, capitale de la nation insulaire de Curaçao, comprend plusieurs quartiers historiques distincts qui illustrent les différentes périodes d’urbanisation et d’expansion coloniales. Punda, partie la plus ancienne de la ville, a été construite au XVIIe siècle sur la rive orientale de Sint Anna Bay, adjacente au Fort Amsterdam ; c’est le seul secteur de la ville doté d’un système de défense fait de murs et de remparts. Les trois autres quartiers urbains historiques (Pietermaai, Otrobanda et Scharloo) datent du XVIIIe siècle. Le Fort de l’Eau et le Fort Rif, également inclus dans le bien inscrit, ont été édifiés à la fin des années 1820 dans le cadre d’un plus vaste ensemble de fortifications. Au milieu de la zone historique s’étend un port naturel en eaux profondes. Le bien couvre 86 ha et est entouré d’une zone tampon de 87 ha.

L’architecture de Willemstad est non seulement influencée par les concepts coloniaux hollandais, mais aussi par le climat tropical et le style architectural des villes de la région des Caraïbes avec lesquelles le comptoir pratiquait le commerce. Les premières habitations construites à Punda suivent le modèle d’aménagement urbain néerlandais. Au XVIIIe siècle commencent à apparaître au niveau local les matériaux et l’artisanat, avec de nouveaux éléments architecturaux, tels les galeries. Parallèlement à l’expansion de la ville au-delà de Punda, le style architectural des maisons évolue. Par exemple, le développement d’Otrobanda ne s’arrêta pas aux remparts et les maisons furent construites sur de spacieux emplacements, ressemblent aux maisons de planteurs entourées de galeries. En outre, les disparités sociales et culturelles des habitants afro-américains, ibériques et caribéens vont contribuer à enrichir les traditions de construction ainsi que la vie culturelle de la cité. Cela donne un style architectural européen avec des adaptations régionales, dans une riche gamme de couleurs caribéennes. Les bâtiments colorés de Willemstad relèvent d’une tradition locale née en 1817, au moment où l’on interdit l’ancienne pratique du badigeonnage des murs extérieurs à la chaux, apparemment pour protéger la vue des effets de la réverbération. Les couleurs prédominantes sont le rouge, le bleu, l’ocre jaune et différents tons de vert.

Willemstad est l’exemple exceptionnellement bien conservé d’un comptoir de commerce colonial hollandais. L’échange de cultures lui fait partager une histoire culturelle commune avec d’autres villes homologues de la région caraïbe, ce qui est un aspect du bien très singulier. Son emplacement unique dans un port naturel qualifie la Zone historique de Willemstad de rare exemple de cité portuaire historique implantée dans un cadre d’eaux naturelles.

Critère (ii): La Zone historique de Willemstad est un ensemble colonial des Caraïbes qui illustre la croissance organique d’une communauté pluriculturelle sur plus de trois siècles. Elle donne aussi l’image d’une remarquable ville portuaire historique des Caraïbes pendant la période d’expansion hollandaise, avec de grandes qualités architecturales et urbanistiques.

Critère (iv): Les quatre quartiers urbains historiques de la ville historique de Willemstad révèlent les étapes successives de l’évolution historique qu’elle a connue au fil des siècles. La ville peut aisément se lire comme un livre d’histoire pour son développement historique et culturel.

Critère (v): Le tissu urbain et l’architecture historiques reposent sur des exemples de traditions européennes qui sont transférés au Nouveau Monde. Les influences de l’Amérique et de l’Afrique et les éléments culturels de la région ont transformé les éléments européens en un développement typique des Caraïbes. 

Intégrité

La Zone historique de Willemstad a conservé son intégrité grâce à la survie de la structure urbaine historique de la période 1650-1800. L’inclusion de plusieurs quartiers historiques distincts autour d’un port actif, qui continue à servir d’accès à la ville, reflète son évolution depuis plus de trois siècles. Une bonne partie du tracé des rues et de la structure urbaine du bien, comme les étroites ruelles de Punda et Otrobanda, sont restées relativement intactes.

La ville n’a pas été sans connaître de modifications ni subir de dégâts dans ses zones historiques. Le développement lié à l’industrie pétrolière a eu un impact sur le quartier historique, à commencer par l’arrivée de la raffinerie de pétrole Shell, à l’aube du XXe siècle. La construction d’une autoroute (dans les années 1960) et de voies d’accès au pont de la reine Juliana (1974) traversent les quartiers historiques d’Otrobanda et de Scharloo. En outre, les incendies de Punda et Otrobanda ont endommagé l’infrastructure historique.

Les menaces qui pèsent sur la zone historique proviennent en partie de la perte de bâtiments historiques qui résulte d’un manque d’entretien de la part des propriétaires et des dommages environnementaux dus à l’eau de mer et au climat. De plus, le bien subit la pression du développement liée à l’industrie du tourisme dont on voit l’impact avec la construction d’hôtels à Punda et sur le front de mer ou encore la rénovation du Fort de l’Eau.

Dès le début des années 1990, de nouvelles organisations de préservation ont été créées et de nouvelles procédures mises en place, auxquelles doivent se conformer les nouveaux aménagements dans la zone historique. Plusieurs projets de développement ont aussi été exécutés de manière organique. À côté de projets d’aménagement privés comme à Kura Hulanda et Pietermaai, le gouvernement et les entités publiques ont joué un rôle prépondérant dans la réhabilitation du centre urbain dans les quartiers historiques d’Otrobanda (Stegengebied, Koralengebied) et, plus récemment, dans ceux de Scharloo et Fleur de Marie. 

Authenticité

Le tissu urbain et le paysage urbain historique n’ont pratiquement pas changé, et les différentes zones du centre ville sont encore reconnaissables. Sint Anna Bay continue d’être exploitée comme un port de travail actif. Le Fort Amsterdam garde une fonction administrative et est le lieu de résidence du Gouverneur, du Ministère, de plusieurs bureaux gouvernementaux et de l’Église protestante unie. Le plan d’urbanisme de Punda a été en grande partie maintenu, avec ses ruelles et ses noms de rues d’origine. Les chantiers archéologiques qui y ont été entrepris en 1990 ont donné des informations sur cette partie la plus ancienne de Willemstad.

Pour ce qui est de l’architecture de la ville, bon nombre de monuments sont authentiques dans leur conception, leurs matériaux et leur qualité artisanale, et sont protégés comme monuments historiques. La tradition des façades de bâtiments colorées continue dans les tons de rouge, bleu, ocre jaune et vert. Il y a aussi un style d’architecture baroque caractéristique de Curaçao, qui prédomine dans les lotissements plus spacieux d’Otrobanda et Scharloo. L’un des traits communs de ce style est le pignon incurvé hollandais, dont l’exemple le plus connu est celui du Penha Building (1708). Les nouveaux aménagements sont intégrés aux bâtiments existants.

Le manque de nouveaux logements, la fragmentation du tissu urbain, ajouté aux restaurations antérieures à l’introduction de règlements, ont eu un impact sur l’authenticité de plusieurs bâtiments historiques. Actuellement, les règles et réglementations sur le remplacement de matériaux importés pour les travaux de restauration et de conservation sont strictement observées. 

Éléments requis en matière de protection et de gestion

Le 10 octobre 2010, l’île de Curaçao est devenue un pays séparé au sein du Royaume des Pays-Bas, ce qui s’est accompagné d’une transformation radicale de la structure gouvernementale et du niveau des instances gouvernementales responsables. Du fait de ce processus de transformation, il a été difficile d’installer un organisme de gestion et le travail sur le plan de gestion a été suspendu.

La situation politique n’a pas eu d’incidence sur le soin apporté au bien du patrimoine mondial. Un acte transitoire garantit que toutes les lois et réglementations qui s’appliquaient auparavant aux Antilles néerlandaises et à l’île de Curaçao sont désormais juridiquement valides dans le nouveau pays de Curaçao. Les règlements et plans obsolètes seront mis à jour par voie de conséquence. Au sein de la nouvelle structure gouvernementale, le Ministère des Transports, de la Circulation et de l’Urbanisme est responsable de la gestion du bien du patrimoine mondial.

La grande majorité des bâtiments et des biens de la zone historique (environ 90 %) est aux mains de propriétaires privés. Le Fort Amsterdam appartient au gouvernement national et un certain nombre de monuments de Scharloo-Oost sont la propriété du gouvernement ou d’institutions connexes.

Un système imbriqué de lois et d’ordonnances constitue une politique officielle relative à la protection des biens individuels, des groupes d’édifices et du paysage urbain dans leur ensemble. Parmi ces lois et réglementations figurent le Plan de développement insulaire (plan de zonage) qui protège le bien en tant que paysage urbain et l’Ordonnance sur les monuments (Monumenten Eilandsverordening, pour les objets sur terre et sous l’eau) qui assure la protection des monuments individuels à l’intérieur du bien. Une protection supplémentaire est assurée à travers l’Ordonnance sur la gestion maritime (Landsverordening Maritiem Beheer), la Convention de Malte, le Décret de construction et l’Ordonnance insulaire pour le développement urbain et régional de Curaçao (Eilandsverordening Ruimtelijke Ontwikkelingsplanning Curaçao (EROC)).

Il existe aussi un système structuré d’instances officielles qui s’occupent de la protection et de la conservation de la zone historique. Au sein du Département de l’urbanisme, de l’aménagement et du logement, le Bureau des Monuments est entièrement responsable de la protection et de la conservation des monuments, y compris du paysage urbain historique. Les nouveaux aménagements et le développement de l’espace urbain sont à la charge de la Division des Programmes et des Projets. Le financement est assuré par le règlement de la contribution d’un programme à long terme pour la préservation des monuments et bâtiments historiques (Meerjarenprogramma Bijdrageregeling monumentenzorg), l’Initiative socio-économique (Sociaal Economisch Initiatief) et d’autres systèmes.

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